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Groupe de Paris du mouvement surréaliste et les alchimistes de la rue Pernelle

Sa Puanteur voyage

A propos de la venue du Pape en France
vendredi 13 septembre 1996.
 

la version latine de ce tract (Peregrinatur Foetiditas Sua) a été faxée au Vatican !

La grogne monte, et l’état français nous ressert un cocktail où se mêlent la fumée des encensoirs et celle des lacrymos. Que les historiens démontrent que le ci-devant Clovis n’a pu être baptisé en 496, les grands chambellans de la nation et de la divinité s’en moquent : enraciner dans le baptistère de Reims la tradition de la France, fille aînée de l’église, que diable, voilà l’avenir ! Choisissez une date arbitraire, sanctifiez-la, que le bon peuple accoure ! Les commémorations ne sont jamais que des mystifications sur lesquelles les états appuient leur prétendue nécessité.

1793, le citoyen Rühl brise la sainte ampoule des sacres royaux. 1996, des Français brûlent leur carte nationale d’identité et le drapeau tricolore.

Clovis, immigré de la deuxième ou de la troisième génération, est pour le Front national le fondateur de l’identité française. Les soldats de Dieu du monastère du Barroux sont, au pli de soutane près, les mêmes que ceux de l’Inquisition, les mêmes que ceux qui massacrèrent les Indiens, armèrent les chouans, bénirent les versaillais, signèrent avec Mussolini les accords du Latran, aidèrent le franquisme, saluèrent avec monsieur Wojtyla et mademoiselle Térésa les dictatures d’Amérique latine. L’église n’affiche son œcuménisme que lorsque le pouvoir lui échappe. Tyrannie ecclésiastique, propagatrice d’un antisémitisme théologique et pratique, cette phallocratie sénile justifia le sexisme, l’esclavage, le salariat et s’acharna toujours contre tout mouvement de révolte. Entreprise totalitaire, elle a montré la voie à d’autres exterminateurs. L’esprit qui souffle du Vatican n’a jamais été que l’esprit de croisade. L’Opus Dei, dont le fondateur fut un suppôt de Franco, place ses pions aux points stratégiques de la machine étatique et économique. L’église est une maffia, mais qui a sur ses pareilles l’avantage de posséder un état, un chef, parangon de tous les parrains. Les enivrés d’eau bénite vont s’enchaîner dans des salles d’hôpitaux où se pratique l’interruption volontaire de grossesse. Plus sobres peut-être, leurs cousins d’Amérique assassinent les médecins. En revanche, les Polonais, dessoûlés des tarés de la tiare, rétablissent la légalité de l’avortement que le Vatican assimile à un génocide. Est coupable de crimes contre l’humanité Wojtyla qui interdit l’usage du préservatif. Disputant le ridicule à l’ignoble, on a pu ordonner en Afrique un autodafé de capotes. 1996, l’ensoutané Lustiger déclare publiquement que les Lumières ont mené au Goulag.

1793, la volonté de déchristianiser la société s’impose. 1871, les communards reprennent cette exigence laïque. 1905, la laïcité entre dans les faits. Aujourd’hui, les manœuvres cléricales consistent à occulter la laïcité en tant que principe de liberté en l’assimilant à une confession. Cette idéologie vise à faciliter la concurrence de type maffieux des différents rackets religieux au nom de la liberté d’expression et de la démocratie. L’église catholique sait qu’en Europe, sans le secours des états, elle serait réduite au rang de secte moyenne.

Là où l’homme se dresse, où s’exaltent son imagination et ses désirs, les religions n’ont jamais su qu’avilir son rapport au sacré. L’homme veut-il décupler ses potentialités, veut-il ouvrir un horizon, les religions s’empressent de le masquer d’un ciel bardé de dogmes et d’interdits. La nécessité humaine du sacré, le plus souvent inconsciente, se manifeste alors en se fourvoyant dans des croyances et des pratiques dont l’une des plus écœurantes est la prolifération des sectes. Irrépressible, l’irrationnel surgit en son pôle négatif, hideux, réactionnaire. Rome profite de ces élans d’exaltation en drainant les âmes en veine d’effusion mystique vers un mouvement charismatique qui, dans les pays d’Amérique latine, a pour but de liquider toutes les subversions se réclamant d’un messianisme libérateur. Dans l’arsenal offensif du libéralisme, les meilleures carabines, celles de la charité chrétienne et de l’humanitaire, doivent maintenir un ordre social où les pauvres sont coupables de ne pas assez remercier leurs affameurs, les puissants. Ce que l’islam assure déjà dans certains pays s’ébauche ici lorsque Chirac rend allégeance au légat pontifical, fait dire une messe à la mémoire de son prédécesseur et propose pour l’été prochain d’accueillir à Paris, aux frais des contribuables, un rassemblement international des rejetons de l’antiquaille catholique. La religion, « cette terrible maladie de l’esprit », comme l’écrit Taslima Nasreen, toutes les religions sont des sectes qui ont réussi à répandre l’infection des égouts sanglants de Dieu. L’athéisme, celui de Sade, de Pauline Léon, de Benjamin Péret, l’athéisme offre tout son sens lorsqu’il ouvre à une humanité enfin majeure la conscience de son aventure. A nous, à vous, le plaisir et la raison ardente d’affirmer un monde désencombré de l’inutile idée de Dieu !

Vendredi 13 septembre 1996 .