Accueil > Publications > chez d’autres éditeurs
"Pour déjouer quelques unes des ruses du désespoir"

L’Événement surréaliste

jeudi 18 novembre 2004.
 

Sur le fond, à mes yeux, le surréalisme fut toujours autre chose qu’une étiquette ou un label. Abandonner le mot, c’est répudier la référence historique, c’est s’autoriser à toutes les déviations. On ne saurait renoncer au mot sans renoncer quelque peu à la chose. Plus tard, on nous a expliqué qu’il s’agissait d’être d’autant plus surréaliste qu’on refusait de dire qu’on l’était. Mais je ne vois là que duplicité, mauvaise foi, mensonge devant soi-même. D’ailleurs loin d’être un "label sécurisant", le surréalisme, pour qui s’en réclame, implique une lourde, une redoutable responsabilité : il faut au moins pouvoir se dire qu’en rigueur intellectuelle, en invention créatrice, on n’est pas trop indigne des ancêtres. Vincent Bounoure à Stuart Inman, 1994.

Entretiens, lettres, préfaces à des expositions, textes théoriques écrits entre 1960 et 1994 permettent, à la suite de Moments du surréalisme paru chez le même éditeur, de comprendre l’importance du rôle de Vincent Bounoure dans le mouvement surréaliste, de saisir ce qui se passe en 1969 lors de l’éclatement du groupe parisien et la nécessité de la clôture pour que l’essence de la quête surréaliste ne se perde pas dans les brouillages d’effervescences douteuses. " Il s’agit non de se montrer, mais d’opérer" dit-il en 1974.

Certains textes, parmi lesquels les lettres envoyées à Vratislav Effenberger en 1969 mettent en lumière le fait que le surréalisme n’est pas que parisien, et que l’entrée en résistance de nos amis tchèques à l’arrivée des chars russes a un écho au-delà du rideau de fer.

Il est urgent à nos yeux de situer l’analyse en ces zones où l’économique et le mythologique, l’infrastructurel et le superstructurel se rencontrent, se déterminent l’un l’autre, se reflètent en engrenant l’un sur l’autre. Tâche à laquelle le surréalisme n’avait jamais manqué sans peut-être y mettre l’accent, déclare Vincent Bounoure en 1978 dans un entretien publié dans ce livre.

L’introduction de Michel Lequenne permet de saisir quelques uns des fondements de cette geste à laquelle nous devons tant.