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Réponse d’Allan Graubard

dimanche 25 janvier 2004.
 

1. The voluptuous is to life as love is to sex. It is, and is something more than, the love of love and the love of sex. It sustains within passionate love a sensibility touched by the sublime - the transformation of sex into an act of love, the pursuit of sex in the pursuit of love.

2. There is no other love that interests me, no other woman I love more than the woman I love. And that, for me, is voluptuous. That is the voluptuous I want, I must have ; I do have. A perfume that carries the scent of our sex ; that floats over us as we have sex and that lingers on after we have sex.

The voluptuous : the perfume of desire.

3. It says that other vivant conditions, like the voluptuous, require the most common mechanisms to set them off. For the voluptuous, this is very clear : exceptional food and drink, the ritual of the dance, seduction, emotional conflict, sex extenuated to explosive orgasm…

It means that you must be willing to risk your self to embody your desire ; to lose yourself in the other while losing the other ; this other you can never possess. And that, too, is part of the voluptuous : the exquisite theater of loss.

4. The voluptuous ravishes me, suspends and twists me. It brings me to a point of intensity, a point where the physical and the psychic intertwine. This is my birth, or I should say, my re-birth in my death ; the death I live as I live.

Of death alone, the voluptuous says nothing.

5. My wish to experience it, again and again.

6. Breton was right.

7. When the voluptuous becomes a value held in common, and power extends from that value beyond, say, a circle of friends, the voluptuous changes. It is a fascinating change, no doubt, but also one I’d avoid.

8. The voluptuous is an intimate, idiosyncratic experience. I rather doubt that will change. But there is a difference between a society that marginalizes the voluptuous by moral aversion or packages it as a commodity, and a society that celebrates the voluptuous in common rituals by preserving its seclusion from worldly affairs — the very aspect that draws me to it, again and again.

Would a future phalanx devoted to the voluptuous provoke its rituals devoid of the banality of mass festivals, the kind we have today in Carnival, say, or Mardi gras ?

I can’t answer that question. I only know that while festivals can ravish my senses, and erotically charge the quotidian, giving birth to wild dreams of possible futures, I do not, in the end, trust them.

My individuality is in direct proportion to how I sustain it, for and against collective ends.

I think that answers the question best.

9. Passional attraction is an intriguing illusion that reveals something profound about us, no ?

I eroticize natural cycles for many reasons. I’m passionate ; I desire voluptuous sensations and encounters. I seize the voluptuous as an idea, a goal, knowing that whatever I do to arouse it may exhaust me before I seek it again. I see the world this way ; I see myself in the stars this way. The analogy exists for me ; I suspect it does for you. It’s natural, the most natural thing in history, our history of the world.

Allan Graubard
January 25-27, 2004

TRADUCTION J.G.

RÉPONSE D’ALLAN GRAUBARD À L’ENQUÊTE SUR LA VOLUPTÉ

1. La volupté est à la vie ce que l’amour est au sexe. Elle est l’amour de l’amour et l’amour du sexe, et quelque chose de plus que cela. Elle entretient dans l’amour passionné une sensibilité marquée par le sublime - la transformation du sexe en acte d’amour, recherche du sexe à la recherche de l’amour.

2. Il n’est pas d’autre amour qui m’intéresse, pas d’autre femme que j’aime davantage que la femme que j’aime. Et cela pour moi est voluptueux. C’est la volupté que je veux, que je dois avoir ; et je l’ai. Un parfum qui a l’odeur de notre sexe ; qui flotte au-dessus de nous quand nous faisons l’amour et qui persiste après l’amour.

La volupté : le parfum du désir.

3. Elle dit que les autres conditions du vivant, comme la volupté, requièrent, pour les déclencher, les mécanismes les plus communs. Pour la volupté, c’est très clair : des mets et des boissons exceptionnels, le rituel de la danse, la séduction, le conflit émotionnel, le sexe qui s’exténue dans l’explosion de l’orgasme. Cela signifie que l’on doit être prêt à risquer son moi pour donner corps à son désir ; à se perdre en l’autre tout en perdant l’autre ; cet autre que l’on ne peut jamais posséder. Car cela aussi fait partie de la volupté : le théâtre exquis de la perte.

4. La volupté me transporte, me laisse interdit et en proie à la confusion. Elle me mène à un degré d’intensité où le physique et le psychique s’entrelacent. C’est ma naissance, ou plutôt ma re-naissance dans ma mort, la mort que je vis au moment où je vis.

De la mort seule, la volupté ne dit rien.

5. Mon désir de la connaître, encore et encore.

6. Breton avait raison.

7. Quand la volupté devient une valeur détenue en commun, et que son pouvoir s’étend depuis cette valeur jusqu’au delà, mettons, d’un cercle d’amis, la volupté change. Sans doute est-ce là un changement fascinant, mais je préférerais m’y dérober.

8 La volupté est une expérience intime, idiosyncrasique. Je doute que cela puisse changer. Mais il y a une différence entre une société qui marginalise la volupté par répugnance morale ou la conditionne et l’exhibe comme une marchandise et une société qui célèbre la volupté dans des rituels communs en préservant son retrait des affaires du monde - le côté même qui ne cesse de m’attirer chez elle.

Un futur phalanstère consacré à la volupté inventerait-il des rituels exempts de la banalité des fêtes populaires, comme le sont devenus aujourd’hui le Carnaval ou le Mardi-Gras ? Je ne puis répondre à cette question. Je sais seulement que, si les fêtes peuvent transporter mes sens et charger érotiquement le quotidien en donnant naissance à des rêves sauvages de possibilités futures, je ne leur fais, finalement, pas confiance.

Mon individualité varie en raison directe de la manière dont je la conforte, à la fois pour et contre les fins collectives.

Je pense que cela répond au mieux à la question.

9. L’attraction passionnée n’est-elle pas une illusion mystérieuse qui révèle quelque chose de profond à notre sujet ? J’éroticise les cycles naturels pour mille raisons. Je suis passionné ; je désire des sensations et des rencontres voluptueuses. Je conçois la volupté comme une idée, comme un but, sachant que tout ce que je fais pour la susciter peut m’épuiser avant de la poursuivre à nouveau. C’est ainsi que je vois le monde ; ainsi que je me vois dans les étoiles. L’analogie existe pour moi ; je soupçonne qu’elle existe pour vous. Elle est naturelle, la chose la plus naturelle dans l’histoire, dans notre histoire du monde.

Allan Graubard 25-27 janvier 2004

1) Comment décririez-vous la volupté ?
(Celle que vous éprouvez, celle que vous partagez.)

2) Pensez-vous que, par delà le plaisir, l’orgasme et sa jouissance, il y a des conditions particulières pour que l’acte sexuel engendre la volupté ? Lesquelles ?

3) Que nous dit-elle sur notre condition de vivants ?

4) Quel éclairage vous apporte-t-elle sur le sens de la vie, de la mort, et de leur reproduction ?

5) Pensez-vous pouvoir la considérer comme le bien absolu ?

6) Participerait-elle, au centre d’une conscience et/ou d’une inconscience approfondies, du point suprême de l’esprit, tel que l’a exprimé André Breton ?

7) A-t-elle pu inspirer plus ou moins directement quelques civilisations, quelques traditions, quelques utopies ?

8) Pourrait-elle, sans pour autant être banalisée ou exploitée, être assumée par une société et à quelles fins ?

9) De l’infiniment petit à l’infiniment grand, concerne-t-elle les phénomènes cosmiques dont nous n’appréhendons que la mécanique, mais dont les mouvements forcent à l’analogie ?