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Le 31 juin

mardi 22 juin 1999.
 

Quand l’expérience subie provoque à cœur l’intolérable, quand le noir décompose et recompose les couleurs en vivacités, quand rien n’échappe au regard de celui qui, en toute rigueur ne se pense ni acteur ni spectateur, cela donne...

Je pris de mes jours une vue discontinue où seules marquaient quelques émotions violentes, les frissons de la poésie, les vertiges de la vie amoureuse. C’étaient pour ainsi dire des continents demeurés en blanc sur les cartes et où chaque exploration que je décidais à neuf, incomparable aux précédentes comme aux ultérieures, par-là garantie contre la répétition, comme je le constatais de proche en proche, formait l’éclatante évidence d’un fait réel en face de l’injustifiable, de l’indéfendable réalité des substances, celles que je touchais et moi-même, les unes et l’autre n’accédant à leur réalité que dans leur rencontre. J’enjambais des moments morts, mais je les vis peu à peu s’ordonner autour des instants de la plénitude car, me sembla-t-il, toute détermination négative tient sa qualité de déterminations contraires : nostalgie ou désir, l’absence se rapporte à la présence. Je m’étais alarmé de voir ma vie coupée en deux parts, à la vérité fort inégales, l’une morne et continue, l’autre segmentée en scintillations rares et fugitives. J’avais ressenti ce contraste comme une dislocation jusqu’au jour où il m’apparut que la banalité n’avait de sens et ne trouvait son salut que dans l’attente de la flamme qui, d’un coup en quelque point de la durée, la consume toute.

Cela donne « le 31 juin ».

Des « lignes écrites contre toute doctrine » par Vincent Bounoure.