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La rage au Clair

mercredi 2 juillet 2003.
 

Abîme d’ignorance, sommet de confusion, palme d’or du mensonge, trophée de l’abjection, on ne sait de quel terme illustrer la gamme des haut-le-cœur suscités par la lecture du dernier livre de Jean Clair, Du Surréalisme dans ses rapports avec le totalitarisme et les tables tournantes. Cependant nous n’aurons pas à brandir « la cravache de l’indignation et de la concentration qui soupèse » : les falsifications éhontées, la bouffonnerie et la cuistrerie du loustic qui dirige le musée Picasso, ont été dûment fustigées par Annie Le Brun dans le n° 855 de La Quinzaine Littéraire. Que la technique stalinienne de l’amalgame et la pratique du mensonge énorme à la Goebbels fassent désormais partie de la panoplie du bonimenteur médiatique n’a rien que de banal dans l’époque du consensus et de la correction politique. Mais, plus généralement, l’entreprise de Jean Clair s’inscrit dans le courant du dénigrement systématique de mai 68. Cette réaction qui s’abreuve au positivisme à la Houellebecq et au néoconservatisme à la Murray-Taguieff, et dans sa version de gauche ne cesse de réclamer toutefois plus d’État, ne hait rien tant que la révolte et l’insoumission. Ce qu’elle exècre dans le surréalisme, c’est l’exaltation de la poésie et du désir, sans renoncer jamais à la violence et à l’excès qui les anime et qui les fonde.

Le pantin de carton est d’autant plus triste et malheureux qu’il ne sera pas giflé par André Breton comme le fut son camarade Ehrenbourg en 1935 sur le boulevard Saint-Michel.

Le groupe de Paris du mouvement surréaliste